A titre gracieux
Consacrer un site à Maryse Choisy implique d’être régulièrement contacté par des étudiants-chercheurs, journalistes, etc. Je le suis beaucoup moins, c’est un euphémisme, pour Fagus (un poète barbu, c’est moins sexy qu’une femme journaliste en immersion dans les milieux de la prostitution).
En juillet dernier, j’étais contacté par une agence chargée de réaliser des recherches pour une « web série documentaire » pour Arte. L’un des épisodes sera consacré au Mont Athos, et il y sera question de Maryse Choisy qui, d’après son livre Un mois chez les hommes, s’y est infiltrée en se travestissant (ce qui est très loin d’être avéré, Maryse Choisy avait le don de s’inventer une vie).
On me demandait en haute définition la photo de couverture du livre + des portraits de la dame. Comme certaines personnes chargées de chercher ne savent pas forcément bien le faire sur un site, il a fallu consacrer quelques échanges à montrer ce que je pouvais avoir et à déterminer des choix.
On me proposait spontanément un tarif de 100€/image, en m’expliquant que c’était en moyenne ce qu’on leur demandait pour ce type de projet. Est-ce que cela me convenait ? Bien sûr. Je ne roule pas sur l’or, ce serait un apport appréciable – plusieurs images étaient retenues — et ce serait une juste récompense du travail documentaire que je partage gratuitement sur le site. On me demande alors trois portraits en basse résolution pour que réalisateur puisse faire son choix au montage durant l’automne.
Récemment, changement d’interlocuteur.
Il n’est plus question que de la couv, dont on me demande si je détiens les droits. Là encore, comme ça ne sait pas chercher, je m’en occupe et je renvoie vers l’ayant-droit de l’éditeur. Je ne réponds pas à la demande d’un tarif « préférentiel », attendu qu’il n’est question que d’une image, mais j’interroge sur le choix du réalisateur quant aux portraits. Finalement, le réalisateur ne les a pas retenus.
Comme il s’avère que la couv est libre de droit, on se permet de m’en demander la reproduction HD « à titre gracieux ». La logique m’échappe. Un peu l’impression d’être pris pour une poire, d’avoir passé du temps pour rien, pour des incompétents avec qui je n’ai rien en commun et pour un docu qui s’avérera à tous les coups des plus pauvres, voire erroné, quant à Maryse Choisy. Je réponds : « Après tout, si le réalisateur s’est intéressé à Un mois chez les hommes, je peux supposer qu’il l’a lu, qu’il en a un exemplaire et qu’il peut s’occuper d’en faire un scan. Si ce n’est pas le cas, et ce serait bien dommage, le livre peut se trouver en ligne pour trois fois rien. Certes, c’est du temps à y consacrer, et comme dit le proverbe, le temps, c’est de l’argent. De mon côté, je n’en ai pas, du temps, pour si peu. » Et je conclue en parodiant Michaux : « Donc, c’est non ». Je ne cite pas la dernière réponse que j’ai reçue car elle est à crever de rire, ou de mépris.