Mon père, ce béret vert

En 1990 — j’avais 16 ans et je collectionnais encore, pour la dernière année, les timbres —, je visitai, dans ma petite ville, qui était toujours de garnison, une « bourse aux armes et aux collections ». Je ne me contentais pas de chercher des timbres, je regardais les armes (oh les baïonnettes !), les uniformes (oh les beaux galons !), les casques (oh à pointe !), les médailles, les livres (oh *Mein Kampf* !, je faillis l’acheter pour 5 francs mais finalement je préférai prendre un petit manuel d’instruction du soldat des années 1900), etc.

Je cherchais aussi un souvenir pour mon père qui avait été béret vert (dans la légion étrangère comme dans les commandos marines). Je lui trouvai un insigne et un livre, d’un certain Georges Fleury : Bérets verts en Algérie, Rossel édition, coll. « Des temps et des hommes », 1974.

Quelques mois plus tard, mon père eut un accident cardiaque et fut hospitalisé. C’est à l’hôpital qu’il termina de lire le livre que je lui avais offert : à l’intérieur du rabat de couverture se trouve une électrode et une date, 10 avril 1991.

C’est au moment de sa mort, vingt-cinq ans plus tard, que je me rendis compte que sur l’une des quelques photos du cahier central, mon père s’était reconnu et avait reconnu tous ses compagnons, précisant, pour chacun, son numéro de bataillon, sa ville d’origine ou s’il était mort. Il avait aussi corrigé une erreur dans la légende. Sur cette image, mon père a 18 ans.

 

 

 

 

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